La Marche de l’hemilpegique : AnALYSE CINESIOLOGIQUE et techniques de reeducation

 

 

 

INTRODUCTION

 

La marche est une succession d’appuis alternés des pieds au sol avec déplacements du corps liés à la mise en jeu de chaînes articulaires et musculaires.

Elle est un phénomène complexe qui met en jeu le corps tout entier.

Sa perte ou son altération sont source de retentissement fonctionnel et psychoaffectif (notion de handicap).

Chez l’hémiplégique ces anomalies de la marche résultent de perturbations du contrôle moteur, de la sensibilité profonde, des fonctions cérébelleuses.

Statistiquement plus de 80% des hémiplégiques remarchent avec ou sans aides techniques.

Cependant la marche reste parfois fonctionnellement précaire : asymétrique, inesthétique, fatigante, peu sécurisante avec un risque de chute accru.

En effet, la sécurité du mouvement est un facteur indispensable à la répétition de ce mouvement, elle est un facteur motivant psychologiquement, et un facteur de prévention primaire du risque de grabatisation de la personne (immobilisation par peur de chuter / fracture consécutive à la chute).

La perte ou le manque de mobilité entraîne une perte de fonction, un enraidissement des membres et des articulations qui se fixent en mauvaise position, avec des douleurs et une perte fonctionnelle des membres atteints.

L’analyse de la marche permet au rééducateur de déterminer au mieux les techniques les plus adéquates afin de prévenir ou corriger le schéma de marche altéré, le but étant de rendre la marche la plus fonctionnelle possible : sûre, harmonieuse , avec un minimum d’aides techniques, peu fatigante et dans une moindre mesure la plus esthétique possible.

L’adaptation individuelle du patient à ses séquelles n’est pas toujours une anomalie, car le patient utilise ses possibilités résiduelles. Ce sont ces possibilités qui doivent être optimisées par le rééducateur par un travail spécifique des paramètres spatiaux, temporels et psychologiques de la marche.

 

Cette démarche discriminative et analytique est une application pratique du diagnostic kinésithérapique.

 

 

Récupération de la marche chez l’hémiplégique : mesures sur le locomètre (REMY-NERIS ET collABORATEURS)

Le moyen le plus simple de quantifier l’importance de la récupération chez les hémiplégiques est la mesure de la vitesse moyenne de marche. Ici la méthode de mesure est le locomètre qui est un dispositif simple d’utilisation, fiable et dont les mesures sont reproductibles. Le locomètre permet de mesurer pour chaque cycle locomoteur la durée totale du cycle, la durée des phases de balancement et d’appui uni ou bipodal et l’amplitude de l’enjambée qui correspond à la distance qui sépare deux appuis d’un même pied. Tous les sujets (témoins et hémiplégiques) n’ont eu comme consigne que de « marcher à leur vitesse de marche préférée ». Les résultats obtenus chez les sujets hémiplégiques montrent une vitesse moyenne spontanée de progression inférieure à 0.6 m/s et une marche caractérisée par une asymétrie et une irrégularité des cycles locomoteurs. Les sujets témoins (sujets sains) avaient des cycles très réguliers et une vitesse de marche supérieure ou égale à 0.6m/s. En outre il a été constaté une réduction de l’enjambée du côté hémiplégique aux dépens du pas antérieur.

Or une vitesse de marche optimale, choisie par le sujet, correspond à un moindre coût énergétique. Ainsi la réduction de la vitesse de progression chez l’hémiplégique semble répondre à un compromis entre l’optimisation du mouvement et sa réalisation avec un coût énergétique le plus faible possible. De plus pour une vitesse donnée on note une augmentation de la cadence du pas afin de compenser la réduction de l’enjambée.

La mesure des vitesses de balancement montre que celle côté sain est très nettement supérieure à celle obtenue côté hémiplégique ce qui correspond à l’esquive de l’appui côté hémiplégique. Donc la réduction de la vitesse de marche se fait essentiellement par une augmentation de la durée des  phases de double appui, par réduction de l’enjambée et augmentation de la cadence du pas.

4 hypothèses se dégagent a propos de la diminution de l’enjambée :  insuffisance des fléchisseurs de hanche, hypertonie des muscles de hanches, co-contraction des muscles extenseurs de hanche durant la phase oscillante, modification des conditions biomécaniques de marche

Toutefois, l’enjambée dépend elle-même de facteurs biomécaniques complexes et encore mal compris: avancée du centre de gravité, rotation de bassin, flexion de hanche.

Les constatations post rééducation sont en définitive que l’augmentation de la vitesse de marche se fait essentiellement par une augmentation de la cadence du pas et non par une amélioration qualitative du cycle locomoteur.

 

 

ANALYSE DE LA MARCHE DE L’HEMIPLEGIQUE :ANALYSE DES VARIABLES TEMPORELLES DU CYCLE DE MARCHE ET DE L’EMG CINESIOLOGIQUE (SPIERER, BLANC et collABORATEURS)

Le matériel de mesure utilisé par les auteurs est un ensemble de télémesure biologique SFENA couplé à un dispositif EMG.(Tableaux 1 et 2, document2 en annexes)

L’analyse se fait selon deux volets : observations globales et étude de l’activité musculaire.

 

Présentation des observations

q       Malposition du pied durant la phase d’oscillation côté hémiplégique

q       Diminution du nombre de cycles de marche d’environ 30 % par rapport à un individu sain

q       Durée de l’appui unipodal coté sain augmentée et oscillation côté sain réduite

q       Durée du cycle de marche quasiment égale côté sain versus côté hémiplégique

q       Démarche stéréotypée avec faible variabilité intra sujet et forte variabilité inter sujet

 

Etude de l’activité musculaire

q       Diminution globale de l’activité musculaire (surtout le jambier antérieur)

q       Prématurité de contraction des jambier postérieur, soléaire et jumeaux

q       Activité quasi nulle de l’extenseur commun des orteils

 

 

Analyse de la marche et patients cerebroleses (Roques et collaborateurs)

Les auteurs ont étudié la marche de l’hémiplégique grâce à une technique spécifique (dite « kymographique ») autorisant un enregistrement sur une distance significative afin d’objectiver les troubles de la marche.

3 volets d’analyse se dégagent : observations, corrélations statistiques et implications pratiques en rééducation.

 

Modifications observées

Corrélations

Diminution de la vitesse de marche

degré de spasticité

Diminution de la longueur du pas

degré de spasticité

Diminution de la cadence de marche

degré de spasticité / coût énergétique

Accroissement du temps de double appui

degré de spasticité

Indice de symétrie

degré de spasticité

Diminution des vitesses de balancement

degré de spasticité

Diminution de l’appui unipodal côté hémiplégique

troubles de la commande

Accroissement de l'asymétrie des temps balancement/ double appui

troubles de la commande

Asymétrie des vitesses de balancement

troubles de la commande

 

Implications pratiques en rééducation :

q       Travail du temps de double appui : travail des fléchisseurs de hanche, travail sur l’inhibition de la spasticité du quadriceps, amélioration de la commande des releveurs et du pied / compensation

q       Asymétrie de la vitesse de balancement : travail des rotations de bassin, des dissociations de ceintures,  de l’avancée du centre de gravité, des fléchisseurs de hanche, amélioration de la commande des releveurs et du pied / compensation

q       Diminution du temps d’appui unipodal : à travailler en fonction de la récupération locomotrice et de la spasticité résiduelle notamment au niveau du triceps sural.

L’analyse de la marche dans toutes ses composantes est un préalable indispensable afin de caractériser les déficits, choisir les axes thérapeutiques, apprécier l’évolution locomotrice des patients hémiplégiques de manière objectivable et quantifiable.

 

 

LA REEDUCATION DE LA MARCHE DES HEMIPLEGIQUES (ALLOVON et collaborateurs)

Les auteurs définissent les buts de la rééducation de la marche : d’abord la rendre possible puis améliorer ses performances selon les critères suivants : sûreté, stabilité, autonomie, efficacité, moindre coût énergétique, non-douleur, esthétique.

Tous les degrés de performances sont possibles ; toutefois la stratégie de rééducation  doit être replacée dans l’environnement socio-familial du patient. La multitude des aspects à prendre en compte va influencer directement la rééducation dans ses aspects pratiques : projet du patient, environnement, activités de la vie quotidienne.

Les auteurs citent le concept Bobath comme s’inscrivant dans cette direction de rééducation fonctionnelle avec des principes de rééducation qui peuvent être source de progrès importants : travail de réintégration du côté hémiplégique et de son hémichamp, travail de l’équilibre en utilisant l’apprentissage du déplacement du centre de gravité (condition d’un mouvement de marche correct et d’une dépense énergétique réduite), apport d’un maximum d’informations possibles par des stimulations proprioceptives, visuelles, tactiles.

Un certains nombre d’aides techniques facilitent le travail de l’hémiplégique dans le cadre d’une reprise de la marche :

q       Travail sur plan incliné : facilite la posture du pied en charge pour lutter contre l’équin et la spasticité, reprise de conscience de la station debout, début de travail en charge du côté atteint. Ce travail est parfois associé à la SEF.

q       Travail au standing : travail du redressement du tronc, et d’extension de la ceinture pelvienne en toute sécurité

q       Utilisation d’une orthèse légère de maintien de maintien de genou : facilite la mise en charge et donc l’apparition de réaction de soutien en début de rééducation..

q       Surélévation du côté sain : permet de faciliter le passage du pas en recherchant une bascule du corps du même côté.

q       Contentions du pied : attelle postérieure anti-équin et anti varus quand celui ci n’est pas fixé.

q       Cannes et déambulateur : La canne anglaise est à proscrire en général car elle aggrave le transfert du poids du corps du côté sain. Il vaut mieux travailler la marche sans canne en équilibrant les pas quitte à différer une autonomie complète de marche. Toutefois dans le cas où la récupération est efficace la canne anglaise peut s’avérer intéressante dans la reprise de la marche en favorisant la qualité d’appui, la longueur des pas, l’équilibre dans le plan frontal…

Les techniques instrumentales facilitent elles aussi la récupération :

q       SEF : utilisée au niveau de la loge antéro-externe de jambe ou sur le trajet du SPE afin de favoriser la stabilité du pied dans le plan frontal  Son utilisation doit être prolongée dans le temps. Elle permet de refaire marcher les patients relativement tôt de façon autonome, elle est un facteur de motivation et participe à une réduction des principaux défauts de marche.

q       Bio Feed Back : il s’agit d’une méthode d’apprentissage apportant au sujet au cours d’exercices une rétro information sur ses performances donc une possibilité de corriger ses erreurs. Elle permet d’objectiver des performances musculaires (traitement de la spasticité), de pression (transfert de poids), angulaires (lutte contre le flexum et le récurvatum). Cette technique est d’un grand intérêt dans la réalisation de bilans.

Les techniques manuelles occupent bien sûr une place de choix

q       Travail passif et postures : entretien de la liberté articulaire, nursing musculaire (élasticité musculaire), entretien des éléments musculo-tendineux.

q       Travail musculaire global : notamment la méthode PNF de Kabat

q       Travail musculaire analytique

 

 

Rétraction musculaire et spasticité (C. ALLEZOT)

La spasticité est définie comme une hypertonie constituée par une exagération des activités réflexes qui utilisent l’arc myotatique. Elle peut être cliniquement mise en évidence par une exagération des réflexes ostéotendineux et une augmentation de la réponse musculaire à l’étirement. L’expression spastique segmentaire (lors de la mise en œuvre de programmes moteurs statiques ou dynamiques) et les modulations en série de syncinésies pathologiques sont les principaux problèmes rencontrés lors de la rééducation.

Cette spasticité agit directement sur les propriétés intrinsèques du muscle (élasticité, viscosité, plasticité, nombre de sarcomères…)

L’état spastique engendre, en déséquilibrant les actions musculaires la position vicieuse de l’articulation ; l’adaptation en longueur des muscles à cette position se traduit dans des délais assez courts par une hypoextensibilité des groupes musculaires soumis à cette spasticité et par une diminution des possibilités de contraction en course interne des muscles antagonistes. La création d’un déséquilibre agoniste/antagoniste entraîne donc une asymétrie articulaire. En outre les contractions musculaires induites par la spasticité conduisent le muscle à agir dans une position de plus en plus raccourcie auto-aggravant ainsi la position raccourcie et ce d’autant plus que les antagonistes, inhibés, deviennent de moins en moins efficaces.

L’approche thérapeutique doit se faire par des techniques passives et actives :

q       Passives : prévention de l’hypoextensibilité par des mobilisations avec étirements des groupes musculaires concernés, postures manuelles ou instrumentales, surveillance de l’installation au lit, verticalisation précoce sur plan incliné pour éviter les flexum de hanche et de genoux (causés par la position assise prolongée) et posturer les fléchisseurs de hanche et de genou en extension et étirement des triceps suraux.

q       Actives : stimulation des muscles non sollicités par le schéma spastique afin de rééquilibrer le tonus musculaire agoniste- antagoniste, sollicitation de ces muscles en course interne, SEF aidant la contraction volontaire, et enfin sollicitation des muscles spastiques en course externe afin de favoriser la sélectivité de la commande motrice volontaire.

Rétractions musculaires et spasticité sont intimement liées. L’équipe de rééducation doit déterminer quelles sont les parts respectives de ces 2 éléments dans le déficit fonctionnel du patient, choses difficiles à évaluer mais impératives pour la mise en place d’un bilan-diagnostic kinésithérapique. Car les techniques à utiliser en dépendent, ainsi que le pronostic fonctionnel du patient.

 

 

INTERET DE LA STIMULATION ELECTRIQUE FONCTIONNELLE DANS LA VERTICALISTION PRECOCE DE L’HEMIPLEGIQUE (P.DAVERAT et collaborateurs)

La reprise de la marche , aussi fonctionnelle et esthétique que possible, constitue un des objectifs fondamentaux de la rééducation neuromotrice de l’hémiplégique.

La remise en charge précoce améliore et accélère la restauration des réactions posturales et des réflexes antigravitaires améliorant ainsi les délais de reprise de la locomotion.

L’utilisation de la SEF est abordée en tant qu’appareillage de verticalisation précoce et active par stimulation du quadriceps chez le patient hémiplégique.

Le bénéfice attendu étant d’améliorer le processus de verticalisation en augmentant le transfert du poids du corps sur le côté hémiplégique.

Les constatations après analyses des résultats sont :

q       un gain de transfert du poids du corps plus important après stimulation par SEF

q       une évolution plus rapide du gain de transfert chez les patients traités par SEF

q       un indice de Barthel augmenté en moyenne de 20 points avec un gain dans 60% des cas dans les items transferts et déplacements.

q       tous les patients avaient acquis en fin de programme des possibilités locomotrices : marche aux barres parallèles pour 70% des patients et marche sans aide pour 30% d’entre eux.

q       l’utilisation de la SEF ne semble pas avoir d’effet sur l’apparition d’une spasticité.

De plus la participation active du patient déclenche probablement un processus de facilitation neuromotrice entraînant une contraction du quadriceps dans un schéma d’extension global du membre inférieur (effet carry-over ou rémanence)

 

 

Hémiplégie vasculaire : place actuelle de la stimulation électrique fonctionnelle (SEF)                             (B. BRUGEROLLE)

Le rôle de la SEF est de permettre qu’au moment de la stimulation, la contraction musculaire ait un rôle fonctionnel ; elle peut aider à la reprise de la marche en améliorant ses conditions spatiales et temporelles.

Elle est actuellement utilisée en rééducation comme aide technique facilitatrice ou comme appareillage nécessaire de façon transitoire ou ponctuelle.

Elle peut être utilisée au niveau de la loge antéro-externe afin d’obtenir une sollicitation de la flexion dorsale de cheville voire comme un appareillage de rétro-information proprioceptive. En stimulant la flexion dorsale- éversion de cheville par un dispositif spécifique corrélé à la vitesse du patient ainsi qu’à la fin de la phase oscillante de la marche, on rétablit la composante kinesthésique déficitaire. Ainsi la finalisation du geste créé une nouvelle motivation et favorise la ré-intégration d’un schéma de marche correct.

Il faut noter que ce dispositif doit être utilisé dans le cadre d’une rééducation globale du membre inférieur.

L’utilisation de cet appareillage de stimulation électrique fonctionnelle est efficace dans 77% des cas. Toutefois, elle est le plus souvent abandonnée avant 6 mois et remplacée par une orthèse type releveur qui améliore le schéma de marche en supprimant les contraintes inhérentes à la stimulation électrique fonctionnelle.(tolérance cutanée, spasticité diffusante, manque de fiabilité de l’appareil). Cet abandon se justifie soit par la récupération du déficit soit par la stabilisation de celui-ci.

 

 

Le pied spastique de l’hémiplégique vasculaire (MALDJIAN, FOUQUET et collaborateurs)

La déformation la plus couramment observée est un pied varus équin associée à une griffe des orteils entraînant une gêne fonctionnelle à la marche. Le plus souvent la marche reste possible mais entraîne l’apparition d’un schéma de marche altéré : attaque par l’avant pied, récurvatum de genou, fauchage, appui instable sur le bord externe du pied, parfois effondrement de l’arche interne du pied.

Ni la cotation de la spasticité (intensité de la réponse à l’étirement, exagération des ROT), ni l’évaluation de la réponse musculaire ne permettent de prévoir l’évaluation fonctionnelle du pied. Seul un bilan orthopédique régulier mettant en évidence les actions musculaires globales et les interactions  des muscles moteurs du pied ainsi que leurs syncinésies, qui se modifient en charge, est à même de pouvoir orienter les actions thérapeutiques.

Les conséquences de la synthèse des actions musculaires, à évaluer aussi bien en charge qu’en décharge, sont autant de facteurs amenant à la formation d’épines irritatives sous la forme de durillons plantaires et/ou pulpaires pouvant augmenter les troubles du tonus.

Dès lors il est facile de concevoir que les déformations vont aller en  s’auto aggravant.

Au stade de récupération de la marche, les patients recherchent spontanément une vitesse de marche au détriment d’un schéma de marche sûr, peu fatigant ou harmonieux.

Et l’intégration d’un schéma de marche erroné paraît inéluctable. La kinésithérapie, dans un but de rééducation de la marche au stade séquellaire apparaît donc illusoire.

D’autre part l’appareillage semble à proscrire :

q       La chaussure orthopédique ne doit pas tendre à corriger le varus équin sous peine d’exacerber la spasticité avec risque d’escarre malléolaire externe.

q       Les orthèses plastiques anti équin engendrent des contraintes qui tendent à augmenter la spasticité et ne corrigent pas la position du pied dans le plan frontal donc ne corrigent pas la malposition du pied.

Aussi seuls les moyens medico-chirurgicaux semblent pouvoir concourir à une amélioration du schéma de marche : alcoolisations de certains points moteurs dépendant du schéma de marche observé, voire ténotomies et/ou neurotomies sélectives.

1/ Techniques

Les ténotomies associées (tendon d’Achille, jambier post, fléchisseurs propres et communs des orteils) ont peu de suites post opératoires (élément important chez des patients poly pathologiques). Elles autorisent une reverticalisation et une rééducation postopératoire immédiates. Les patients concernés par cette intervention sont en moyenne à 4 ans de leur AVC initial

La kinésithérapie est alors axée sur un ré apprentissage d’un schéma de marche correct et adapté, avec un travail plus particulier du contrôle de la flexion du genou et de la dorsiflexion de cheville.

2/ Résultats

q       Qualité de marche : autonomie d’intérieur améliorée (prévention primaire du risque de chute à domicile)

q       Périmètre de marche/ Vitesse de marche : augmentée dans 80 % des cas

q       Chaussage : amélioration du confort de marche (diminution du risque d’épine irritative, augmentation de la qualité de vie)

q       Aides de marche : simplifiées mais ratio peu significatif

La marche reste toutefois difficile d’une part  parce qu’un pied varus équin fixé signe une hémiplégie sévère , d’autre part les nouvelles conditions biomécaniques (instabilité postopératoire) créées par la chirurgie nécessitent une approche kinésithérapique spécifique :

q       Analyse des modalités de marche

q       Restauration des déficiences en essayant de s’orienter vers une marche la plus physiologique possible.

La technique chirurgicale est récente, elle nécessite une recherche kinésithérapique spécifique et adaptée.

 

 

La phase précoce de la reprise de la marche (Viel, Ogishima)

L’étude approfondie de la biomécanique amène à des constatations importantes :

q       L’initiation du pas est obtenue par une rotation du bassin sur le fémur fixe

q       Le bassin doit s’abaisser du côté du membre inférieur qui passe le pas

q       Les pieds doivent être suffisamment rapprochés afin de favoriser le déplacement latéral du bassin.

q       Le genou doit rester en légère flexion durant l’appui

La marche est le résultat d’actions musculaires séquentielles parfaitement synchrones mettant en jeu l’ensemble du corps, donc l’ensemble des segments les uns par rapport aux autres. L’inertie résiduelle favorise donc le déplacement, mais son inadéquation lorsqu’elle est ciblée sur un ou des membres perturbe et retarde l’enchaînement des séquences.

Cette interdépendance des segments corporels montre que si l’on accepte une compensation à un niveau donné, les répercussions mécaniques seront immédiates prenant la forme d’une fatigue excessive, d’une boiterie, d’une démarche instable et dangereuse.

 

 

La marche chez l’hémiplégique : bilan et modalités thérapeutiques (J.PELISSIER)

1.    Caractéristiques de la marche de l’hémiplégique

q       Altération des paramètres temporo-spatiaux : vitesse réduite, longueur du pas et vitesse d’oscillations réduites, temps portant augmenté coté atteint, durée du double appui augmenté, variabilité de la longueur du pas et de la durée des diverses phases de marche.

Les temps de double appui  et des temps portants sont augmentés aux dépens des temps oscillants, le pas est plus court, plus bref. L’hémiplégique est incapable d’allonger la longueur de son pas ou de réduire la durée des temps de double appui.

q       Altération  cinématique : insuffisance d’extension de hanche, de flexion de genou et de flexion plantaire lors du temps portant – insuffisance de flexion de hanche, de flexion de genou lors du temps  oscillant et  excès de flexion plantaire lors de l’attaque du pas.

Les profils de puissance sont comparables côté sain versus côté hémiplégique, et la lenteur de la marche compense son coût énergétique élevé par mètre parcouru.

Vitesse de marche, cadence (à vitesse confortable) sont reproductibles chez un même patient.

Le test des 10 mètres de marche est un bon indicateur sensible, pertinent et bien corrélé à la mesure d’indépendance fonctionnelle.

2.    Modalités thérapeutiques : rééducation et techniques medico-chirurgicales

ü     Prise en charge précoce selon les principes de Bobath

ü     Neurolyse chimique par alcoolisation (SPI, nerf tibial) : inhibe la spasticité, favorise l’action des releveurs.

ü     Toxine botulique A : inhibe la spasticité, favorise la réintégration d’un schéma de marche correct avec une amélioration sensible des paramètres temporo-spatiaux de la marche.

ü     SEF péronière : 2 effets

¨     Effet efférent : par activation musculaire des releveurs du pied

¨     Effet afférent : facilitation de la commande volontaire avec gain de puissance et réduction de la spasticité des antagonistes (effet de rémanence ou carry-over)

ü     Orthèses jambières : type releveur : faciles à mettre, confortables, dissimulables dans une chaussure du commerce (notion de handicap), efficaces sur le déroulement du pas, facilitent le relèvement de pied mais stabilisent peu l’arrière pied. Elles sont efficaces sur un pied équin tombant ou spastique mais inefficaces sur un pied varus équin spastique.

ü     Chaussage : semelle large et antidérapante, talon de 15 à 20 mm ou plat, avant pied souple, chaussage aisé par velcro de préférence, doit permettre l’utilisation d’une orthèse type releveur. La chaussure sur mesure de l’hémiplégique est à déconseiller.

Elle masquerait plus qu’elle n’améliore les conditions de marche.

 

Synthèse des tendances RELEVEES

 

         La marche de l’hémiplégique est caractérisée par une altération de ses paramètres temporo-spatiaux : diminution de la vitesse, de la longueur du pas, asymétrie d’appui, coût énergétique élevé et performance limitée dans le temps et l’espace. Elle relève plus des adaptations individuelles que d’une systématisation. Il y a une faible variabilité intra individuelle mais une grande variabilité interindividuelle.

De ce fait il est nécessaire de caractériser la marche de chaque patient pour déterminer quels paramètres de la marche doivent être travaillés. L’approche objective, mesurable, fonctionnelle,  de la marche de l’hémiplégique est un très bon moyen de caractériser les déficits pour ensuite tenter de les corriger. Il faut rechercher une approche qualitative.

 Le coût énergétique de la marche du patient hémiplégique est 70 % plus élevée que pour un individu sain. Améliorer la qualité de marche permet donc d’en diminuer le coût et par la même d’augmenter le périmètre de marche résultant, l’autonomie du patient, la trophicité articulaire et musculaire, de favoriser la reprogrammation neuromotrice du patient, de prévenir le risque de chute et d’atténuer au maximum le handicap esthétique du patient. Le réentrainement à la marche par la marche paraît être une aberration : l’entretien d’un schéma altéré ne doit être toléré que pour les hémiplégies les plus sévères.

La qualité de marche est donc le gage d’un bon pronostic fonctionnel. Le réentrainement à la marche doit s’inscrire dans une démarche globale de réentrainement du membre inférieur.

 

Certains auteurs ont souligné une notion fondamentale de « pré-requis anatomique » (intégrité articulaire et viscoélasticité musculaire). En effet si l’on considère le corps comme une entité mécanique tout défaut de mobilité unitaire va se révéler gênant dans le cadre d’une mobilité globale ; Le corps est un assemblage d’éléments anatomiques qui sont mobilisés de manière synchrone : séquence d’activation, durée, amplitudes…Le moindre dysfonctionnement se répercute rapidement sur l’ensemble de la structure. Donc la marche doit être segmentée dans ses différentes phases et travaillée ainsi et l’intégrité des amplitudes articulaires anatomiques, l’absence de rétractions musculo-tendineuses sont des conditions impératives.

 

Les aides de marche et les orthèses sont un élément discuté : en fait elles ne doivent être utilisées que si elles n’entraînent  aucun conflit de contact ou d’appui susceptibles d’augmenter ou de diffuser la spasticité. Leur action doit être facilitante et non gênante.

Leur utilisation est donc laissée à l’appréciation du rééducateur.

 

La rééducation de la marche est une rééducation analytique au sens que les phases doivent parfaitement s’enchaîner : travail d’une phase après l’autre en veillant à l’intégration des données kinesthésiques, proprioceptives et musculaire. L’hémiplégique semble avoir oublier comment on marche, il se débrouille et s’adapte. La rééducation de l’hémiplégique est un ré apprentissage sensitivomoteur.

 

Les techniques de récupération sont nombreuses, variées mais parfois difficiles à mettre en œuvre soit par leur aspect technique, soit par les qualités d’analyse et l’expérience dont le rééducateur doit faire preuve. La technique de Bobath semble être la méthode de rééducation fonctionnelle la plus adaptée, particulièrement en ce qui concerne la marche.

 

 

 

 

Cas clinique

Bilan initial fait le 30/01/2001

 

1.    Anamnèse

Mr. A. , 43 ans, patient hémiplégique gauche suite à un accident vasculaire cérébral d’origine hémorragique le 4/04/2000 est entré à l’hôpital de Cimiez le 29/04/2000.

Il se présente en fauteuil roulant type harnasse , avec une écharpe d’épaule. Il est arrivé seul en salle de rééducation. Il vit avec sa femme et sa fille dans une maison individuelle sur le même terrain que la maison de ses parents. Sa maison dispose d’un étage (une dizaine de marche) sans rampe.

Il exerce la profession de commis de bar.

q       Latéralité : gaucher

q       Antécédents médicaux : colites néphrétiques en 1978 et 1988

q       Antécédents chirurgicaux : RAS

q       Autonomie antérieure : complète

 

2.    Bilan des fonctions supérieures

q       Apraxies : RAS

q       Agnosies : héminégligence peu marquée - Astéréognosie complète main côté  hémiplégique – hémianopsie latérale homonyme avec baisse de l’acuité visuelle (port de lunettes et modification de la correction des verres suite à l’AVC) – hémiparésie faciale inférieure gauche

q       Compréhension et communication : pas de désorientation temporo-spatiale, parole intelligible et sensée, bonne compréhension générale

 

3.    Inspection, palpation

Ø     Attitude générale :

q       Attitude spontanée au fauteuil roulant : bon tonus de tronc, bras G en écharpe d’adduction et rotation interne. Il est arrivé en salle de rééducation tout seul.

q       Attitude couchée : Rotation externe du membre inférieur marquée côté hémiplégique, cheville en flexion plantaire, adduction, supination, métacarpo-phanlangienne fléchie côté hémiplégique, main hémiplégique en griffe.

q       Attitude assis en bord de table : stable, subluxation de l’épaule G cotée à 2 travers de doigts.

q       Attitude debout : récurvatum de genou, pied en varus équin, légère rétropulsion  et bascule latérale du bassin côté sain, membres inférieurs en légère adduction, bonne stabilité générale.

Ø     Troubles trophiques :

q       pas d’escarre, pas d’algodystrophie

q       amyotrophie de la main, du bras et de l’épaule côté hémiplégique

q       rétractions des fléchisseurs de hanche, du triceps sural, des fléchisseurs de poignet et des extenseurs des doigts

q       pas de perfusion, pas de sonde urinaire

 

4.    Bilan des douleurs

q       Spontanée // A la palpation // A la marche // Lors des transferts : absentes, aucune plainte douloureuse

q       A la mobilisation de l’épaule hémiplégique des douleurs apparaissent dans les amplitudes extrêmes.

 

5.    Bilan de la spasticité : aucune spasticité résiduelle n’est détectable.

 

6.    Bilan de la sensibilité

Au niveau du MSG, toutes les composantes de la sensibilité sont absentes

Au niveau du MIG, la sensibilité profonde est présente, avec perception des positions intermédiaires au niveau de la hanche et du genou mais absente au niveau de la cheville et du pied.

 

7.    Bilan du tonus

q       Tonus de tronc en position assise: normal, en position debout : normal

q       Tonus du membre supérieur hémiplégique : hypotonique, aucune tonicité détectable

q       Tonus du membre inférieur hémiplégique : en charge hypertonique, en décharge normotonique

 

8.    Bilan orthopédique

Ø     Limitations articulaires

a.     Membre supérieur : il est totalement non fonctionnel

b.    Hanche : Flexion 70° // Extension 5° // Abduction 40°

c.     Genou :Flexion 100 ° // Extension 0°

d.    Pied : Flexion dorsale de cheville 10° // Flexion plantaire 50° //  Orteils en griffes // Pied varus équin non fixé

 

9.    Bilan de la motricité

a.     Automatique : RAS         

b.    Réflexe : RAS       

c.     Volontaire : Altérée

 

10.          Bilan fonctionnel

q       Retournements, rehaussements : autonome

q       Transferts : autonome

q       Equilibre : réactions parachutes présentes en déséquilibre antéro-postérieur, mais difficiles en déséquilibre latéral.

L’appui unipodal est possible à l’aide du membre supérieur mais se fait en récurvatum. La flexion de genou en appui unipodal est très difficile.

q       AVQ : autonome

q       Marche : autonome dans les barres parallèles, marche avec une canne mais est dépendant de la présence physique et orale du kinésithérapeute. (FAC=2 voir annexe 1 document 1)

q       Test des 10m de marche : 20 pas, et environ 9 secondes.

Il bénéficie d’une cale de rehaussement afin de faciliter le passage du pas ainsi que d’une orthèse type releveur thermoplastique. Il ne peut monter les escaliers.

Descriptif des phases de marche : (avec releveur)

q       Attaque du talon : se fait par le Ve méta

q       Pied à plat au sol : contact au sol par la partie externe du pied

q       Décollement du talon : se fait grâce à la flexion de genou et l’amorce de l’inclinaison latérale.

q       Décollement des orteils : même mécanisme

q       Avancée du membre inférieur : se fait par un « fauchage » avec une inclinaison latérale et bascule de bassin

q       Extension totale : récurvatum

Le releveur semble atténuer les défauts de marche. La marche sans releveur est impossible.

 

11.          Bilan spécifique

Traumatique/Respiratoire/circulatoire/cardiaque :  RAS

Altération de la vue : -3 et –4 dioptries à G et à D

 

12.          Profil psychologique

Marqué par une peur importante de chuter. Il est coopérant, un peu somnolent, reste enthousiaste, présent et impliqué. Il manque parfois de concentration.

Ressenti du patient : reste optimiste sur sa récupération en ce qui concerne la marche. Il a fait le deuil de son bras droit, mais veut récupérer une marche autonome.

Ressenti du rééducateur : mon patient attend beaucoup de sa rééducation mais ses ambitions restent disproportionnées par rapport au stade de sa récupération. La peur de la chute le bloque, physiquement et psychologiquement.

 

Conclusion des bilans : Mr. A., 43 ans, gaucher, atteint d’une hémiplégie gauche, présente une altération psycho-sensori-motrice de ses possibilités de marche : peu sûre, en fauchage, fatigante et donc par la même limitée en distance.

 

13.          Diagnostic kinésithérapique

Déficits : déficit de stabilité en charge plus par appréhension que par atteinte somatique, marche stéréotypée en fauchage et récurvatum, déficit proprioceptif au niveau du pied hémiplégique

Incapacités : marche instable et dépendante, ne peut monter les escalier

Handicaps : dépendant pour les déplacements supérieurs à 10m, risque de chute, perte d’autonomie, reprise du travail impossible.

 

 

 

 

Rééducation

 

Durant toute la rééducation je ne néglige pas la prévention des troubles de l’épaule (SEF, positionnement correcte de l’épaule, prévention de la spasticité et des troubles trophiques).

Cependant je n’insisterai pas sur les techniques employées concernant l’épaule car celles ci ne cadrent pas le sujet de ce mémoire.

Buts : rendre la marche plus stable donc plus autonome. Essayer de rechercher une marche fonctionnelle en réintégrant le patient dans un environnement social

Principes :

1.    Travail analytique des phases de marche avec faibles déplacements segmentaires pour rechercher la stabilité en charge et l’équilibre debout

2.    Travail fonctionnel : transfert et marche sur faible distance avec bilan de l’équilibre au cours de la marche (get up & go test et test des 10m de marche). Ce sont des exercices ambulatoires rééducatifs

3.    Augmenter progressivement les distances de marche en recherchant une fonctionnalité maximale .Ce sont des exercices ambulatoires utilitaires

Moyens et techniques :

1er exercice : préparation à la marche sans fauchage

position de départ : patient en décubitus dorsal, MI sain tendu. Le sujet exécute une flexion extension de genou d’abord avec l’aide du thérapeute puis seul. Je demande des mouvements d’abord d’amplitude importante, puis de plus en plus faible. Puis je demande à mon patient de fermer les yeux et d’amener le MI sain dans la même position. Cet exercice très simple peut être répété par le patient dans sa chambre afin de l’impliquer dans sa rééducation. La perception de l’amplitude du mouvement des différents segments est fondamentale pour reprendre une marche stable.

Réaction du sujet : Il arrive progressivement à discriminer les positions de son genou.

 

2e exercice : travail de perception articulaire

Position de départ : assis en bord de table, membre inférieur lésé sur un skateboard. On désigne 3 positions au sol matérialisées par des lignes colorées. Le patient déplace le skateboard selon mes ordres en augmentant progressivement la vitesse d’exécution et l’ordre des séquences. Ensuite je déplace le skateboard et je demande à mon patient de l’empêcher de bouger. Là aussi je joue sur la vitesse d’exécution en augmentant progressivement la vitesse de mes sollicitations. Cela me permet de réduire le temps de latence entre la contraction du quadriceps et des ischios-jambiers afin de ré harmoniser leur contraction.

Réactions du patient : le patient contrôle de mieux en mieux le skateboard, l’aspect ludique est intéressant.

 

3e exercice : travail du transfert de poids et de l’équilibre unipodal

Pour objectiver mes résultats et travailler en toute sécurité je travaille avec un plain inclinable et 2 balances. Mon patient est en position quasi verticale (85°) je lui demande de venir appuyer de plus en plus sur le côté lésé. J’obtiens jusqu’à une charge de 90% du poids du corps sur le côté lésé. En progression je laisse le patient utiliser son récurvatum puis je place une légère cale derrière chaque genou laissant quelques degrés de flexion (5 à 10°) en demandant toujours un transfert du poids sans relâcher le genou côté lésé. Là aussi j’obtiens près de 90% du poids du corps transféré sur le côté lésé sans déverrouillage du genou.En progression l’exercice se fait debout devant l’espalier, le membre supérieur sain tient lieu de stabilisateur, le membre inférieur hémiplégique est d’abord placé en fente avant et en légère rotation interne puis se rapproche de plus en plus du plan frontal.

Réactions du patient : il maîtrise rapidement l’exercice et sa variante debout, mais fatigue.

 

4e exercice : travail de la phase d’appui

Le patient se place latéralement par rapport à l’espalier, bras côté sain sur une des barres de l’espalier. Le membre inférieur lésé en fente avant et en légère rotation externe. Je me place devant lui une main placée sur l’aile iliaque côté lésé. Je lui demande d’avancer le bassin au delà du pied côté lésé. Ma main stimule la rotation du bassin sur le fémur fixé au sol ce qui facilite et augmente le déport du poids. En progression je demande de décoller très légèrement le talon. Cet exercice se fait d’abord genou tendu (utilisation du récurvatum) puis genou légèrement fléchi

Réactions du patient : la fatigue est de plus en plus présente, l’exercice en récurvatum est réalisé correctement mais en légère flexion de genou le patient déverrouille au bout de 2 répétitions.

 

5e exercice : travail de la phase oscillante et du passage du pas

Le membre inférieur sain est placé en fente avant. Je demande à mon patient d’avancer le membre inférieur lésé au delà du membre inférieur sain. Je me place devant mon patient. Ma main est placée sur la crête iliaque côté lésé et stimule par un mouvement imprimé au bassin orienté d’arrière en avant et en rotation interne (la hanche exécute alors une rotation externe) afin de faciliter le passage du pas.

Réactions du patient : le genou est d’abord en récurvatum mais par correction verbale mon patient arrive à corriger son récurvatum jusqu’à l’extension physiologique normale.

 

2e série d’exercice : Get up and go test: se lève seul, d'une chaise vers le fauteuil roulant (distance environ 3m) mais l'équilibre est extrêmement précaire. A ce stade de la rééducation, je considère donc que ce test n’a pas une valeur fonctionnelle évidente.

Au test des 10 m de marche mon patient réalise un score de 18 pas et 9 secondes.

 

3e série d’exercices : EAU (exercices ambulatoires utilitaires)

Il s’agit de confronter le patient à la vie sociale lui faire voir d’autres patients et l’inciter par le biais du regard des autres et par son regard sur les autres à corriger sa marche. Mon patient utilise une canne tripode, je suis placé du côté lésé et je contrôle le verrouillage de son genou. En progression je supervise et oriente la déambulation de mon patient sans contact physique. La piste de marche est parfaitement plane et sans obstacle.

Réactions du patient : Au début la marche est saccadée, asymétrique et en récurvatum de genou ; mon patient emmêle toutes les séquences et semble être affolé et perdu. Après un arrêt de quelques minutes pour le calmer et lui permettre de se reconcentrer nous reprenons l’exercice qui se déroule sur une vingtaine de mètres ; les efforts pour contrôler sa marche sont exténuants mais l’exercice est réalisé. La flexion de genou commence à être contrôlée, le fauchage est diminué, les rotations de bassin réapparaissent mais la fatigue est telle qu’il apparaît en fin de séance une trépidation épileptoïde du pied.

 

Evolution: Fonctionnellement la marche est améliorée. Mon patient est passé d’une dépendance physique intermittente à la marche (FAC=2 voir annexe1 document1) à une dépendance supervision (FAC=3). Mais les paramètres qualitatifs de marche n’ont été que peu améliorés (précarité de l’équilibre et enchaînement des phases incorrects)

 

 

 

Relations entre littérature et réalité

 

Certains principes forts restent bien ancrés dans la littérature : rééducation et verticalisation précoces, progressives, nursing musculo-articulaire, prévention des déformations orthopédiques. La reprise de la marche est un élément majeur dans la prévention des troubles de décubitus chez des patients déjà très polypathologiques avec une recherche de fonctionnalité et d’autonomie. Presque tous les auteurs s’accordent à dire qu’il est nécessaire de lutter contre l’enregistrement d’un schéma de marche altéré et son entretien. Toutefois si l’on se place du côté du patient on peut s’interroger si l’on ne doit pas laisser s’installer un schéma de marche sub normal mais fonctionnel plutôt qu’un schéma de marche correct mais trop coûteux en énergie donc non fonctionnel. Aussi la recherche d’une fonctionnalité maximale est prioritaire par rapport à un critère de qualité de marche qui semble purement théorique. Il faudra donc parfois préférer l’utilitaire au rééducatif selon les bilans obtenus, les indices de progression et le projet du patient. Certains articles ont même démontré qu’il valait mieux laisser remarcher un hémiplégique (malade polypathologique par excellence) avec un schéma de marche altéré, puis intervenir à distance de l’hémiplégie par chirurgie, neurochirurgie et kinésithérapie spécifique afin de reconquérir une marche correcte. Un schéma de marche altéré ne doit pas être vécu comme un échec rééducatif mais comme une compensation temporaire qui dépend de facteurs souvent extérieurs au rééducateur voire même parfois au patient . L’importance de la lésion, sa localisation , les adaptations individuelles, la psychologie du patient sont autant de facteurs qui jouent sur le pronostic fonctionnel. L’adaptation aux séquelles fait aussi partie des rôles du rééducateur. Il faut savoir rester humble face à tous ces éléments. Il n’ y pas de règle infaillible. D’où l’intérêt des bilans et du diagnostic kinésithérapique afin d’orienter les techniques et de prioriser certains éléments par rapport à d’autres.

 

 

 

CONCLUSION

 

La démarche de travail que j’ai proposée est une démarche d’analyse sectorielle (recherche des défauts) qui doit être replacée dans un travail plus global.

C’est un travail à type de diagnostic kinésithérapique.

Toutefois ce travail demande beaucoup de temps et compte tenu des réformes actuelles, il sera peut être difficile d’amener à des reflexions sur l’efficacité d’un traitement.

Il est fondamental pour nous, futurs praticiens, de commencer à nous habituer à la détermination de pratiques rééducatives données pour un patient donné, non à une pathologie donnée. Certains outils de rééducation s’imposent dans certains cas et pas pour d’autres 

 

Il y a des hémiplégiques et non une hémiplégie.

 

Ce travail a été réalisé dans un esprit d’analyse à partir d’un cas concret. L’hémiplégie est une pathologie complexe, multifactorielle et grave. De plus elle est malheureusement fort courante et une marche altérée est souvent son corollaire.

Toutefois il faut remarquer et savoir apprécier les phénomènes de compensation mis en place lors de la marche. Il faut savoir que la marche est une activité hautement sophistiquée : « 29 degrès de liberté pour chaque membre inférieur, et l’activité synchrone de 48 muscles sont nécessaires afin d’assurer la locomotion (VIEL et OGISHIMA) »

Il serait prétentieux de ma part d’amener à des conclusions tant les écrits sur la marche humaine ont été nombreux, denses et parfois contestés.

 

Le champs d’exploration des outils de rééducation concernant la marche de l’hémiplégique est vaste. Reste maintenant à valider ces techniques.